16 janvier 2019
Débat sur la solidarité intergénérationnelle
M. Daniel Chasseing. À l’heure du grand débat national, à la veille de la réforme des retraites, le débat qui nous rassemble aujourd’hui nous amène à nous interroger sur les moyens que nous pouvons mettre en œuvre pour retisser les liens sociaux, économiques et culturels entre les âges, mais aussi pour retrouver le sens de la solidarité intergénérationnelle, qui est moins importante en France que dans les autres pays européens.
Une économie florissante est indispensable pour assurer une juste redistribution des ressources. La croissance et la vitalité de nos entreprises sont directement liées aux montants des transferts qui financent les dépenses publiques de solidarité : moins de production, moins d’entreprises, moins de salariés, c’est aussi moins de ressources de l’État pour financer la solidarité intergénérationnelle dans les domaines de la santé, des retraites, du chômage, de l’aide aux familles les plus fragiles, ou encore de la dépendance.
En complément de cette action des collectivités et de l’État, qui est le socle de notre modèle social, comment améliorer cette solidarité intergénérationnelle ?
De nombreuses solutions existent déjà dans nos territoires pour rompre l’isolement des seniors – je pense notamment à l’aide aux aidants et à l’aide à domicile – et pour soutenir les jeunes qui cherchent leur place dans la société.
Ces solutions se multiplient en jonction avec le monde associatif. Il faut encourager tous les bénévoles qui souhaitent transmettre leur savoir-faire, par le biais, notamment, de l’apprentissage, qui valorise les métiers manuels.
Madame la secrétaire d’État, dans le cadre de l’entente intergénérationnelle, quelle place donner aux seniors dans l’information sur les métiers et l’initiation professionnelle qui est offerte dans le cadre scolaire, mais aussi aux jeunes majeurs sans formation ?
Comment, pour reprendre l’expression de Victor Hugo, raviver « la flamme aux yeux des jeunes gens » et reconnaître « la lumière » dans ceux des anciens ?
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, concernant votre première question, je tiens à rappeler que la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, portée par Mme Muriel Pénicaud, a transféré aux régions le soin de l’information et de l’orientation en la matière. Les régions sont, de fait, libres d’associer à des actions d’orientation les acteurs qu’elles choisissent, y compris des retraités.
Ces actions ont lieu dans les établissements scolaires, mais elles peuvent aussi être effectuées dans d’autres contextes par les collectivités territoriales, en particulier les communes. On peut faire du repas intergénérationnel un temps privilégié dans les cantines. C’est tout le travail que mènera M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, dans le domaine des associations et du bénévolat : comment inclure les seniors et les retraités dans ces actions ?
Concernant les seniors à l’école, dans le cadre des expérimentations conduites dans l’académie de Paris, un programme européen labélisé a été mis en place il y a une douzaine d’années, en partenariat avec l’association Ensemble demain, afin de permettre le développement de projets intergénérationnels sur le temps scolaire et périscolaire. Des retraités isolés, des associations de retraités et des établissements d’accueil de retraités peuvent s’investir dans un travail bénévole avec des écoliers, des collégiens, des lycéens et des étudiants en leur apportant leurs compétences lors d’activités pédagogiques prévues dans le projet d’école ou d’établissement.
On voit bien là tout l’enjeu de la relation entre les associations, les bénévoles et les différentes collectivités – communes pour les écoles primaires, départements pour les collèges, régions pour les lycées. Il y a un dialogue important à engager pour faire se rencontrer deux mondes.
M. Daniel Chasseing. La solidarité familiale doit bien sûr être encouragée et soutenue ; cela fait partie des devoirs moraux que nous devons amplifier.
Sur le plan de l’avenir de la formation et de l’emploi, madame la secrétaire d’État, je rejoins vos propos : il faut encourager les associations qui, aux côtés des centres de formation des apprentis et des lycées professionnels, portent l’ambition de valoriser les métiers manuels, trop souvent considérés comme des filières de second choix, et d’en faire une voie d’excellence et un puissant levier de transmission des savoirs, d’insertion professionnelle et d’intégration des jeunes.