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Vanina PAOLI-GAGIN : Maintien des élections départementales et régionales en juin 2021

14 avril 2021


Déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat et d’un vote sur cette déclaration, en application de l’article 50-1 de la Constitution, relative à l’organisation des prochaines élections départementales et régionales


Monsieur le Président,

Monsieur le Premier Ministre,

Mesdames et Messieurs les Ministres

Mes Chers Collègues,


Voici plus d’un an que la France vit avec le virus, au rythme des confinements et déconfinements. Les Français se sont adaptés ; ils ont changé leur mode de vie, leur façon de travailler, leurs déplacements, leurs loisirs. Leurs relations sociales sont contraintes par les restrictions sanitaires, et leurs proches n’ont jamais été si loin.


Ces chambardements ont dessiné pour chacun de nous, un nouveau quotidien dans tous les aspects de nos vies. La vie démocratique, qui n’est jamais qu’un seul de ces aspects, a profondément évolué au gré de la situation sanitaire. Et il vrai que la vie démocratique ne ressemble pas, en ce moment, à ce qu’elle était avant la pandémie, mais elle continue son cours, bon gré mal gré.


Il faut dire que tout avait commencé sous de sombres auspices, avec l’annonce du premier confinement le 14 mars 2020, à la veille des élections municipales. On connaît la suite : maintien du premier tour malgré la sidération et l’inquiétude. Les élus locaux, les assesseurs et les présidents de bureaux de vote ont été fidèles au poste : leur engagement exemplaire a permis la bonne tenue de ce scrutin, si essentiel à la démocratie locale.


Depuis, quasiment toutes les élections ont pu se tenir, malgré des aménagements substantiels. Et force est de constater que ces aménagements, s’ils ont profondément changé le visage des élections – notamment pour les municipales, dont le second tour s’est tenu plusieurs mois après le premier –, n’ont finalement pas entamé la légitimité des élus, fort au contraire.


Je pense bien évidemment aux dernières élections sénatoriales, dont je suis issue et qui ont concerné la moitié d’entre nous. Mais je pense aussi aux renouvellements des conseils intercommunaux, ou encore aux élections professionnelles, qui concourent à la vitalité du dialogue social.


Au Parlement, comme dans tous les conseils communaux, intercommunaux, départementaux ou régionaux, la vie démocratique s’est aussi adaptée. Qui au Sénat, pourrait affirmer le contraire ? Comme partout en France, notre Haute Assemblée a dû composer avec les contraintes sanitaires, et nos méthodes de travail ont évolué. Nous avons pleinement rempli nos fonctions de Parlementaires, même si nous l’avons fait de façon inédite, et parfois de façon insolite.


Depuis mars 2020, quasiment toutes les élections ont donc pu se tenir, exception faite des élections départementales et régionales ; nous avons déjà, pour celles-ci voté un premier report à cause de la 2e vague. Il s’agit aujourd’hui de savoir s’il faut opter pour un nouveau report face à une nouvelle vague.


Admettons, tout d’abord, qu’il est plus que légitime de se poser la question. Par rapport à cet hiver, la situation a largement évolué. D’une part, la campagne de vaccination, notamment compte tenu de l’accélération récente, nous permet d’envisager une période d’accalmie, avec le retour des beaux jours. D’autre part, la propagation des variants, entre autres complications, nous incite à la prudence.


En tout état de cause, deux choses sont à ce stade certaines :

- la première, c’est que personne ici ne peut garantir que la situation sera nettement meilleure en juin qu’elle ne l’est aujourd’hui, même si de nombreux indicateurs nous permettent légitimement de l’espérer ;

- la seconde, c’est que personne ici ne peut garantir que la situation sera nettement meilleure en septembre ou en octobre qu’elle ne le sera en juin, même si, encore une fois, de nombreux indicateurs nous permettent légitimement de l’espérer.


Nous devons donc nous rendre à l’évidence : la situation demeurera, au cours des prochains mois, placée sous le signe de l’incertitude. Mais plusieurs éléments nous permettent d’envisager plus sereinement la bonne tenue d’un scrutin en juin prochain. J’identifie au moins trois arguments en ce sens.


Le premier, c’est que nous avons acquis, depuis les municipales, une précieuse expérience en matière d’organisation d’élections par temps d’épidémie. De manière plus générale, nous avons appris à vivre avec le virus. Nous nous sommes équipés pour nous protéger. Nous avons intégré les gestes barrière. Bref, nous avons de quoi aborder peut-être plus sereinement la tenue des prochains scrutins.


Le deuxième argument, c’est l’accélération de la campagne vaccinale. Les chiffres récents sont plutôt encourageants, il faut absolument que nous tenions ce rythme au cours des prochaines semaines, malgré les mauvaises nouvelles liées au déploiement du vaccin Johnson&Johnson… L’objectif des 30 millions de premières doses injectées d’ici mi-juin, nous laisse envisager une participation plus sereine, notamment de la part de nos concitoyens les plus fragiles.


Ce sont sans doute ces deux premiers arguments qui ont emporté la conviction de nos Maires, qui se sont majoritairement exprimés en faveur du maintien de ce scrutin en juin. Ils compteront bien sûr sur le concours de l’État sur les aspects opérationnels de ces prochaines échéances. Tout ce qui pourra être fait en amont, pour garantir aux organisateurs des conditions les plus sûres au plan sanitaire devra l’être. Des aménagements de la stratégie vaccinale pourraient d’ailleurs être envisagés, par exemple pour les assesseurs. Notre Groupe est ouvert aux discussions sur ce point.


Il est bien sûr très important d’écouter l’avis des Maires, qui seront concernés au premier chef, même si la décision in fine échoit, à l’État. Nombre d’entre nous auraient préféré que la consultation se déroule dans de meilleures conditions, mais l’essentiel est que le Gouvernement puisse prendre une décision en connaissance de cause.


Le troisième et dernier argument, c’est que nous pouvons apprendre de nombreux autres pays, qui ont fait face à des situations à bien des égards comparables et qui sont malgré tout parvenus à respecter leur calendrier électoral.


Je pense bien sûr aux élections présidentielles aux États-Unis, je pense aussi à nos voisins européens qui se sont rendus aux urnes et ont trouvé des solutions pour adapter la tenue des scrutins.


La flexibilité et l’innovation ont permis de sécuriser les modalités de vote. Le vote par correspondance a pris une place importante, tout comme le vote par anticipation. Dans certaines régions, en Espagne par exemple, des plages horaires spécifiques ont été mises en place. De manière moins classique, certains votes se sont déroulés à l’extérieur, chez nos voisins des Pays-Bas par exemple ou ont été étalés encore sur plusieurs jours. La démocratie, tout comme les citoyens, fait preuve d’adaptation et d’inventivité pour dépasser les obstacles auxquels elle est confrontée.


Monsieur le Premier Ministre, mes Chers Collègues, la démocratie est aussi précieuse qu’exigeante. Si elle n’est pas régulièrement exercée, elle court le risque de s’anémier. Ainsi, le maintien des échéances électorales n’a pas à se justifier. Il est justifié par la seule nécessité de faire vivre notre démocratie.


Seules les raisons qui pourraient contraindre à un report doivent, à notre sens, être examinées. Et de telles raisons doivent être d’une particulière gravité, d’une nature exceptionnelle et d’une nature ponctuelle, pour qu’un tel report puisse être justifié. Notre Groupe considère qu’à ce jour, de telles raisons ne sont pas réunies. C’est pourquoi nous voterons en faveur du maintien des élections en juin.


Le décalage d’une semaine, avec un premier tour fixé au 20 juin et un deuxième tour au 27, nous paraît à la fois donner un peu plus de temps aux deux campagnes – vaccinale d’une part, électorale de l’autre – pour déployer leurs effets. Ce report nous paraît la meilleure proposition de compromis.

Interventions au Sénat

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