13 décembre 2022
Déclaration du Gouvernement en application de l'article 50-1 de la Constitution suivi d'un débat, sur la politique de l'immigration
🔔 À retrouver sur nos réseaux sociaux
Monsieur le Président,
Madame la Première ministre,
Messieurs les Ministres,
Mes chers Collègues,
« Faire une loi et ne pas la faire exécuter, c'est autoriser la chose qu'on veut défendre. » La phrase du Cardinal Richelieu trouve une résonnance particulière dans l’actualité récente autour d’un sigle dont aucun français n’avait entendu parler il y a quelques mois et que tous connaissent aujourd’hui : OQTF.
Depuis des années, moins de 20 % de ces décisions sont exécutées. Il y a dans notre pays des lois qui déterminent qui peut ou ne peut pas entrer et vivre sur notre territoire. Elles ne sont pas respectées.
La situation actuelle est incompréhensible pour les législateurs que nous sommes, pour les Français que nous représentons et même pour les étrangers concernés.
La France est l’une des premières puissances mondiales, elle doit être en mesure de contrôler ses frontières. Depuis longtemps ce n’est pourtant pas vraiment le cas.
Cet état de fait ne date pas d’hier. Les gouvernements se sont succédés et la politique migratoire n’a jamais été jugée satisfaisante dans notre pays. Ce n’est pas seulement gênant pour notre administration. C’est dangereux pour nos institutions.
En n’étant pas en mesure, ou en ne souhaitant pas, donner un cap clair à cette politique migratoire, nous mettons en danger notre démocratie et la cohésion de la Nation.
De plus en plus de peuples européens portent au pouvoir des populistes et des extrémistes. Même si ce n’est pas la seule raison, les considérations migratoires ont joué un grand rôle dans le choix des Britanniques de sortir de l’Union européenne.
Si l’Allemagne connaît une montée de l’extrême droite, la crise migratoire de 2015 n’y est pas étrangère. C’est un problème que rencontrent également l’Autriche, la Suède, ou l’Italie. Notre pays ne fait pas exception.
D’élection en élection, progresse une extrême droite auparavant très minoritaire au Parlement. Aujourd’hui, elle représente le deuxième groupe de l’Assemblée nationale.
Certains sont parfois tentés de copier ses réponses simplistes en espérant que les Français préfèreront la copie à l’original. C’est un pari hasardeux au succès très peu probable.
Entre la porte grande ouverte, proposée par une extrême gauche qui refuse de voir que notre pays, comme aucun pays d’ailleurs, n’a pas les moyens - ni économiques ni politiques - d’accueillir le monde entier, et la fermeture à double tours, réclamée par l’autre côté de l’hémicycle devenu marchand d’angoisse, nos concitoyens ont le droit de se voir proposer une alternative crédible.
Pour cela, il faut d’abord dire clairement que l’immigration ne doit, à aucun prix, se faire au détriment de la cohésion de notre Nation. C’est à la France qu’il revient de décider d’accueillir ou non des migrants sur son territoire. C’est à nous de fixer les conditions de cet accueil et nous ne devons pas accepter que l’immigration puisse remettre en cause la façon dont notre société a choisi de vivre.
Dans des conditions qui doivent rester contrôlées, la France accorde à certains étrangers l’asile sur son territoire. Cette procédure, par sa nature mais aussi pour demeurer soutenable, ne peut être qu’exceptionnelle.
Sans la maîtrise des frontières qui permet de choisir d’accueillir ou non des migrants, notre société risque de se déliter. Il nous faut au contraire trouver une formule qui nous permette de tirer au mieux parti de l’immigration.
Bon nombre de nos entreprises font face à une pénurie de main d’œuvre. Pour poursuivre leur activité, pour conserver leur compétitivité, beaucoup de nos entrepreneurs recourent à l’immigration. L’exemple britannique est édifiant à cet égard.
En choisissant son immigration, la France pourrait sélectionner les compétences dont elle a besoin. Cela permettra à notre économie de maintenir son dynamisme et de pourvoir aux emplois pour lesquels une pénurie de main-d’œuvre est constatée dans l’ensemble de l’Europe.
Par ailleurs, « Le travail éloigne de nous trois grands maux : l'ennui, le vice et le besoin. » disait Voltaire. Le travail constitue en effet l’un des meilleurs facteurs d’intégration. Cependant, les capacités professionnelles seules ne sauraient suffire. Il faut établir clairement les termes du contrat.
Pour entrer dans notre société, les immigrants doivent en accepter les règles, en partager les valeurs, et en embrasser la culture. Ce sont eux qui souhaitent nous rejoindre et ils demeurent libres de choisir où ils veulent aller.
Il ne s’agit pas là seulement de protéger notre mode de vie. Ces conditions sont également nécessaires à l’intégration des immigrés par notre société et leur permettront de devenir ainsi des citoyens à part entière.
Pour que cela fonctionne, nous devons veiller à ce que, celles et ceux qui seront entrés en France, en respectant ces engagements, ne fassent l’objet d’aucune discrimination.
Si tous ces prérequis ne sont pas satisfaits, nos concitoyens continueront d’avoir le sentiment de subir l’immigration, et les immigrés ne parviendront pas à se fondre au sein de notre société.
Je l’ai déjà dit, la problématique migratoire ne concerne pas seulement la France. L’Europe dans son entier, par son respect des libertés et son dynamisme économique, fait figure d’Eldorado pour beaucoup de personnes dans le monde.
Dans tous les pays de l’Union, la population vieillit. La main-d’œuvre se raréfie et dans le même temps la dépendance de nos aînés s’accroît.
De nombreux États membres font face aux mêmes défis. Il nous faut donc trouver ensemble des solutions qui protègent notre mode de vie, à la fois contre ses propres limites mais aussi contre les ingérences étrangères.
A la suite des chantages turcs, l’Union européenne a pris conscience de l’impossibilité de continuer à sous-traiter à un pays tiers la gestion de ses frontières extérieures. Les Européens doivent assumer leurs responsabilités. La montée en puissance des moyens de l’agence Frontex doit à cet égard être saluée.
Au début de l’année prochaine, le Gouvernement présentera un nouveau texte sur l’immigration. Vous avez dit, Monsieur le Ministre, vouloir « Être méchant avec les méchants et gentil avec les gentils ». En d’autres termes, vous nous proposez de choisir un peu mieux qui doit venir ou rester dans notre pays et qui ne le doit pas. Nous y sommes favorables.
Nous ne feignons pas d’ignorer, comme tant d’autres, que l’immigration peut constituer une menace pour notre société si elle est incontrôlée. Cela ne nous empêche pas d’être pleinement conscients qu’elle est, à bien des égards, nécessaire.
Regardant la réalité en face, nous notons bien la nécessité de faire évoluer une législation qui, par manque d’application, a perdu beaucoup de sens. Nous vous soutiendrons donc dans votre démarche.
Avec une extrême droite en progression croissante et une extrême gauche chaque jour plus irresponsable, nous sommes tous ensemble contraints de réussir là où nos prédécesseurs échouent depuis quarante ans.