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Corinne Bourcier : Définition pénale du viol et des agressions sexuelles

  • Photo du rédacteur: Les Indépendants
    Les Indépendants
  • 19 juin
  • 4 min de lecture

18 juin 2025


Proposition de loi visant à modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles - Dossier législatif



Monsieur le Président,

Madame la Ministre,

Madame la Présidente de la Commission des Lois,

Mesdames les Rapporteurs,

Mes chers Collègues,


Il y a des crimes que l'on crie et d'autres que l'on tait. Le viol fait souvent partie de ceux que l'on a longtemps tus, par honte, par peur, par sidération.


Le viol est un crime où le corps de la victime devient à la fois la scène, la preuve et parfois injustement l'objet du soupçon. Aujourd'hui encore, notre droit pénal ne nomme pas ce qui est pourtant au cœur de cette violence, l'absence de consentement.


Le chemin vers sa reconnaissance a été long, très long, trop long. Il a fallu attendre les années 1990 pour que la jurisprudence pénale évolue et considère que le mariage ne pouvait justifier qu'un conjoint impose à l'autre des rapports sexuels non consentis. Et ce n'est qu'en 2010 que la loi a supprimé ce qui restait de cette présomption de consentement lié au mariage. Cela en dit long sur les résistances qui entourent encore aujourd'hui l'idée qu'un acte sexuel, même au sein du couple, doit être librement consenti.


Depuis la loi de 1980, la définition du viol repose exclusivement sur des moyens de coercition. Violence, contrainte, menace ou surprise. Mais cela ne correspond pas à la réalité des violences sexuelles. Le viol est un crime sans aveu. Dans certains cas, l'auteur ne menace pas, ne frappe pas, ne crie pas. Il agit autrement. Il abuse d'une confiance. Il profite d'un moment d'inconscience. Il exploite ou provoque une situation de vulnérabilité. Il n'a pas besoin de violence visible. Il s'appuie sur le silence, la peur, la sidération.


Et cette sidération, bien connue des professionnels, fige la victime, la paralyse, la dissocie, elle efface parfois même la mémoire du traumatisme. Quand une preuve ADN existe, l'auteur ne nie pas le rapport sexuel, il peut dire simplement : « elle était d'accord ». Et c'est là que tout se complique. Car l'infraction ne peut être retenue que si la justice parvient à démontrer que l'auteur savait que la victime ne consentait pas.


Dans un crime sans témoin, sans aveu, sans violence apparente, cette preuve est souvent impossible à établir. C'est ainsi que le doute s'installe et avec lui le non-lieu, le classement sans suite, le silence. Les chiffres sont effrayants. En 2023, on estime à 270 000 le nombre de personnes victimes de viols, tentatives de viols ou agressions sexuelles. Mais seulement 6% portent plainte.


Et dans 94% des cas de viols signalés, l'affaire est classée sans suite. Ce n'est pas une anomalie, c'est un dysfonctionnement systémique. Parce que dans notre droit, le silence d'une victime peut encore être interprété comme un consentement, alors qu'il devrait être un signal d'alerte. Parce que l'absence de résistance physique est encore trop souvent opposée à la victime, comme si la terreur devait se manifester par des coups visibles pour être crédible.


La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui vise à rétablir une évidence. Un acte sexuel n'est licite que s'il est consenti. Et ce consentement ne se présume pas, il ne se déduit ni d'un regard, ni d'un silence, ni d'une absence de fuite.


Ce texte introduit dans le Code pénal une définition claire du consentement. Il doit être libre, éclairé, spécifique, préalable et révocable. Il ne peut être déduit du seul silence. Il ne peut être donné par une personne inconsciente, vulnérable ou sidérée. Ce n'est pas une révolution juridique, c'est une révolution de clarté. Elle ne bouleverse ni la présomption d'innocence, ni la charge de la preuve. Le Conseil d'État l'a rappelé dans son avis du 6 mars dernier. Cette réforme n'instaure aucune présomption de culpabilité. Elle ne modifie pas l'équilibre du droit pénal, mais elle renforce la lisibilité et la cohérence du système. Elle invite simplement les enquêteurs et les magistrats à interroger d'abord l'existence du consentement plutôt que de chercher des traces visibles de contraintes.


Ce texte a également une puissante vertu pédagogique. Il donne un repère clair à toute la société. Il dit à chaque victime qu'elle a le droit d'être crue, même si elle n'a pas crié. Il dit à chaque citoyen que l'on ne touche pas à quelqu'un sans avoir obtenu son accord explicite. Il aligne encore notre droit sur celui de 15 pays européens qui ont déjà reconnu l'absence de consentement, comme le cœur du viol.


Vous l'aurez compris, le Groupe Les Indépendants votera avec conviction ce texte, parce qu'il est attendu, parce qu'il est juste. Ce texte facilitera, nous l'espérons, le recours des victimes à la justice, mais il faudra aller plus loin. Il faudra que la justice ait les moyens de juger, vite, bien et avec humanité. On le sait, le temps judiciaire devient trop souvent une nouvelle violence. Cette année encore, notre Groupe sera particulièrement attentif au respect de la loi de programmation de la Justice. Pilier du pacte républicain, la Justice est essentielle au bon fonctionnement de notre société et doit à ce titre disposer des moyens nécessaires à l'accomplissement de ses missions.


Le Groupe Les Indépendants, République et Territoires soutiendra l'adoption de ce texte. Nous avons la responsabilité de soutenir et d'accompagner les victimes. La République a un devoir de protection.


SEUL LE PRONONCÉ FAIT FOI.


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