13 avril 2021
Débat sur le thème « La loi EGALIM ou comment sortir de l’impasse dans laquelle ce texte a plongé l’agriculture ? » (demande du Groupe Les Républicains)
Madame la Présidente,
Monsieur le Ministre,
Mes chers Collègues,
Comme j’ai pu l’exprimer lors de ma dernière question au Gouvernement le 24 mars dernier, la loi EGALIM était porteuse d’espoir. Elle n’a néanmoins, à ce jour, pas apporté ses promesses. Sans nier les évolutions nécessaires qu’elle a engendrées, force est de constater que cette loi doit être révisée, ou plutôt complétée afin de garantir la valorisation des productions agricoles et la juste répartition de la chaine de valeur. C’est là un vrai enjeu de souveraineté.
Le récent rapport Papin vient d’apporter des éclairages intéressants sur des pistes à explorer pour améliorer la situation. Je salue notamment la proposition de contractualisation pluriannuelle qui me semble aller dans le bon sens.
Tout cela m’amène à évoquer deux sujets majeurs. Le premier sujet, relatif à la hausse du seuil de revente à perte. En effet, ce dispositif majeur de la loi EGALIM a occasionné la hausse de prix de certains produits sans avoir bénéficié aux entreprises de l’agroalimentaire et aux producteurs agricoles.
On évoquerait 600 millions d’euros occasionnés et non répercutés par la distribution.
Partagez-vous ce constat ? Comment comptez-vous garantir l’équité de cette répartition et comment faire ruisseler les effets du relèvement du SRP jusqu’à nos agriculteurs ?
Le second sujet porte sur les incohérences voire les contradictions d’objectifs entre la loi EGALIM et la loi de modernisation de l’économie. Le sujet est récurrent : les négociations et la revalorisation tarifaire ne fonctionnent pas. La LME est sans doute trop déséquilibrée et dérégule les négociations entre centrales d’achat et leurs fournisseurs. Il me semble aujourd’hui incontournable de réviser une nouvelle fois cette loi pour mieux intégrer les coûts de production et enrayer la guerre des prix et la spirale déflationniste, outil de destruction de valeur.
Alors, Monsieur le Ministre, Comment souhaitez-vous aborder ce sujet pour rendre cohérent et complémentaire ces deux dispositifs législatifs ?
Réponse de M. Julien DENORMANDIE, Ministre de l’Agriculture et de l’alimentation
Madame la Présidente, Monsieur le Sénateur MENONVILLE,
Vous évoquez donc deux sujets, d’abord le SRP ensuite la loi LME.
Sur le SRP, on dispose d’une première évaluation que l’on a reçue à l’automne et cette évaluation, elle a conclu plusieurs choses : que la répartition de ces 600 / 800 millions d’euros du SRP,
1) n’a pas conduit à une augmentation des prix pour le consommateur et je crois que c’est très important de le dire ;
2) a principalement été mis sur des offres de promotion, par exemple les cartes fidélité, etc. et peut-être en partie sur les MDD ;
3) aujourd’hui, on n’est pas en mesure de dire quel a été l’impact sur les agriculteurs ; mais probablement, l’impact sur les agriculteurs a sûrement été très très très inférieur par rapport aux deux impacts que je viens d’évoquer sur le consommateur et sur les MDD.
Face à cela, on est en train de finaliser une nouvelle enquête du SRP qu’on aura cet automne pour aller jusqu’à l’évaluation de l’impact sur l’agriculteur et c’est précisément parce que nous n’avions pas encore tout le détail que dans la loi ASAP vous avez voté la prolongation de ce dispositif. Le deuxième élément sur la loi LME, mais on y reviendra, c’est un des cœurs du sujet. Ce qu’il faut bien avoir en tête c’est que la loi LME a été une loi qui a été une loi « pouvoir d’achat » qui se comprend, qui se justifie mais qui sciemment a dit : on met au sein de toute cette chaîne de négociations agro-alimentaires, une libre négociabilité, c’était ça, revenant ainsi sur la loi Galland libre négociabilité ; et ce faisant, laissant le rapport de force s’opérer entre ceux qui étaient les plus gros, c’est-à-dire les distributeurs et les industriels face aux agriculteurs. Et la loi EGALIM est venue à rebours de la loi LME ; elle n’est donc pas une loi de déflation mais une loi d’inflation du prix agricole. Sauf que, et c’est le cœur du problème, la loi EGALIM a fait cela sans revenir sur un certain nombre de principes de la loi LME et c’est je crois ce qu’il nous faut corriger aujourd’hui.