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Pierre Médevielle : Congrès et assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie

26 mars 2024

Projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral pour les élections au congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie - Voir le dossier législatif



Monsieur le Président,

Messieurs les Ministres,

Monsieur le Président de la Commission des lois,

Monsieur le Rapporteur,

Mes chers Collègues,

 

Je vais vous demander de faire preuve, pour ceux qui ne connaissent pas, d’un peu d’imagination. Imaginez un archipel, situé dans l’océan Pacifique, juste au-dessus du tropique du capricorne.

 

Un ensemble d’îles au climat presqu’idéal, bordées de plages avec des palmiers, au milieu d’une eau d’un bleu sans pareil, au sein d’un lagon parmi les plus grands du monde, protégé par une incroyable barrière de corail.

 

Ça, c’est pour le décor de carte postale, mais néanmoins réel, de la Nouvelle-Calédonie. Il existe cependant, comme partout, l’envers du décor.

Maintenant, continuez d’imaginer. Sur ce même archipel, qui compte environ 270 000 habitants, 42 000 personnes qui sont privées du droit de vote. Soit près 20% de la population.

 

Imaginez donc vivre là-bas depuis 25 ans, travailler, payer vos impôts, ou même y être né, et être privé du droit démocratique le plus basique et fondamental ! Privé de votre statut de citoyen, privé du droit de choisir ceux qui vous gouvernent et décident de l’avenir de votre territoire.

 

C’est une injustice inacceptable dans un pays comme le nôtre. C’est ça aussi, la Nouvelle-Calédonie : un territoire dans lequel certaines règles fondamentales de la République ne sont plus appliquées. C’est ça, l’envers du décor. 

 

En 1998, le corps électoral a d’abord été restreint lors de l’accord de Nouméa, aux personnes inscrites sur les listes électorales jusqu’en 1998, ou alors, aux personnes arrivées après 1998 qui justifiaient, à la date de l’élection, de 10 ans de résidence, quelle que soit la date de leur installation sur le territoire.

En 2007, le corps électoral a finalement été totalement gelé par une révision constitutionnelle. C’est ainsi, qu’aujourd’hui, ne peuvent voter aux élections territoriales, uniquement les personnes inscrites sur les listes jusqu’en 1998.

 

Cette situation, qui peut sembler inimaginable pour un Français de l’hexagone, a été acceptée à l’époque en raison de son caractère transitoire.

 

Dix-sept ans plus tard, nous y sommes, l’accord de Nouméa est caduc : à trois reprises, lors des référendums de 2018, 2020 et 2021, la population calédonienne a exprimé sa volonté de rester française.

Aujourd’hui, cette situation provisoire prend donc fin et les Calédoniens doivent recouvrer leurs droits.

 

Le présent projet de loi constitutionnelle propose de dégeler le corps électoral : celui-ci serait restreint aux personnes inscrites sur la liste électorale générale de Nouvelle-Calédonie, qui y sont nées ou domiciliées depuis au moins 10 ans.

Voter pour ce texte permettra à 25 000 personnes supplémentaires de participer aux prochaines élections provinciales. C’est un juste rééquilibrage des choses.

 

Aujourd’hui, nous rappelons que la situation économique et sociale ne permet plus de reporter ou tergiverser. Rappelons aussi que les dernières élections provinciales ont donné les pleins pouvoirs à une coalition indépendantiste pourtant arrivée avec 16 points de retard.

 

Il faut dire la vérité : même si nous le souhaitons tous, la perspective d’un accord avant les élections semble très incertaine.

 

Le dégel du corps électoral est une première étape pour un retour vers un processus démocratique acceptable. Mais il doit être assorti d’un rééquilibrage de représentativité des trois provinces.

La situation économique et un fort tropisme vers la province sud ont modifié la répartition de population sur le territoire. La province sud est passée de 59% à plus de 75% de la population totale. Il faut donc assurer une répartition plus juste des sièges au Congrès qui tienne compte de ces évolutions.

 

Initiative personnelle de ma part, j’ai déposé un amendement qui va dans ce sens et qui, selon moi, permettra un réel rééquilibrage démocratique.  

 

J’ai dit tout à l’heure que les Calédoniens devaient avoir le droit de choisir ceux qui les gouvernent. Et cet amendement le permettra. Car, aujourd’hui, il faut 2,4 fois plus d’habitants en province sud que dans les îles pour un élu. Là non plus, ça n’est plus acceptable.

 

La peur et l’hésitation ne conduisent, le plus souvent, qu’à faire de mauvais choix. Le Gouvernement et le Parlement se doivent d’assurer la souveraineté et l’impartialité, dans tous les territoires de la République.  Il en va de leur crédibilité. Dans le cas contraire, c’est un très mauvais message qui serait envoyé aux autres territoires ultramarins, et même, à certains territoires de l’hexagone.

 

Par trois fois, Monsieur le Ministre, la Nouvelle-Calédonie a réaffirmé son choix d’être française, il est donc de notre responsabilité de rétablir un véritable processus démocratique sans lequel les discussions futures seraient impossibles.

 

Je vous remercie.

 

Interventions au Sénat

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