Cyril Pellevat - PPR visant à demander au Gouvernement français de saisir la Cour de justice de l'Union européenne pour empêcher la ratification de l'accord avec le Mercosur.
- Les Indépendants
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16 Décembre 2025
PPR visant à demander au Gouvernement français de saisir la Cour de justice de l'Union européenne pour empêcher la ratification de l'accord avec le Mercosur : Dossier législatif
SEUL LE PRONONCÉ FAIT FOI
Madame la Présidente,
Monsieur le ministre,
Mes chers Collègues,
Dimanche dernier, la France a demandé à l’Union européenne le report des échéances prévues pour la signature de l’accord commercial avec le Mercosur.
En effet, cette semaine, auront lieu un sommet du Mercosur ainsi qu’une réunion des États membres de l’Union européenne qui aborderont ce sujet.
Aujourd’hui même, le Parlement européen est appelé à se prononcer sur les mesures de sauvegarde. La Commission espère ainsi finaliser la signature de l’accord dans les jours qui viennent.
C’est dans ce contexte que nous examinons une proposition de résolution européenne aux implications majeures.
Celle-ci demande au Gouvernement de saisir la Cour de justice de l’Union européenne au sujet de la compatibilité de l’accord avec les traités européens.
Une résolution similaire aurait dû être examinée par le Parlement européen il y a quelques semaines, mais le texte a été déclaré irrecevable.
Aux termes de la présente proposition de résolution, une telle saisie de la Cour de justice pourrait intervenir sur les trois fondements suivants.
Le premier est la décision prise par la Commission européenne de scinder l’accord en deux, afin de pouvoir contourner la règle de l’unanimité. Cette décision interroge sur sa conformité au droit européen.
Et pour cause : les directives de négociations adoptées dès 1999 pour autoriser la négociation d’un accord d’association avec le Mercosur exigeaient l’unanimité du Conseil.
Le Conseil lui-même a rappelé en 2018 que c’était à lui de décider au cas par cas de la scission des accords commerciaux. Cette même année, le Conseil a clairement indiqué que l’accord en cours de négociation avec le Mercosur était un accord mixte.
Par ailleurs, la compatibilité de l’accord avec le principe de précaution, pourtant consacré par le Traité sur l’Union européenne, pose débat.
Il n’a échappé à personne que les normes européennes diffèrent sensiblement de celles appliquées dans les pays du Mercosur.
Or, l’accord ne permet pas d’atténuer ces différences. Il va même jusqu’à tenter d’encadrer l’application du principe de précaution, ce qui se révèle évidemment problématique.
Enfin, le mécanisme de rééquilibrage pose là aussi question et constitue l’un des trois sujets sur lesquels se fonderait la saisie de la Cour de justice.
Un tel mécanisme pourrait être instrumentalisé par les pays du Mercosur pour faire pression sur l’Europe afin que nous revenions sur notre législation en matière d’environnement, de produits phytosanitaires ou de climat.
Or faut-il rappeler que les traités européens eux-mêmes imposent le respect de normes exigeantes dans ces domaines ?
En outre, la France ne sera favorable à cet accord avec le Mercosur que si les trois conditions suivantes sont remplies.
Tout d’abord, l’ajout d’une clause de sauvegarde « robuste, effective et activable » pour protéger les marchés agricoles européens contre les déstabilisations.
Deuxièmement, l’instauration de mesures miroirs sur les pesticides et l’alimentation animale.
Quant à la troisième condition, elle porte sur le renforcement des contrôles sanitaires sur les produits importés et dans les pays exportateurs.
Au jour d’aujourd’hui, ces conditions ne sont pas remplies. C’est d’ailleurs pour cela que le Gouvernement demande le report des échéances prévues cette semaine.
Car ces conditions ne sont pas anecdotiques : elles visent à protéger nos agriculteurs, nos consommateurs et notre tissu économique.
Oui, l’Union européenne a obtenu des concessions, parvenant à l’inclusion de l’Accord de Paris et de normes contraignantes sur la déforestation. Mais cela reste insuffisant.
De plus, les pays du Mercosur, eux, ont obtenu d’importantes contreparties en échange.
Entre autres, à la demande du Brésil et de l’Argentine, de nouveaux secteurs seront exclus du champ d’application du chapitre sur les marchés publics. Sans parler du mécanisme de rééquilibrage que j’ai déjà évoqué.
Face à la possibilité qu’une minorité de blocage ne se constitue au Conseil, la Commission s’est engagée à renforcer la clause de sauvegarde bilatérale.
Le problème est que les garanties apportées par cette clause de sauvegarde sont trop faibles. En tout état de cause, elle ne réunit pas les conditions nécessaires pour répondre aux enjeux de la mise en concurrence des filières agricoles de notre continent et du Mercosur.
Pour toutes ces raisons, le groupe Les Indépendants salue les travaux menés par les auteurs et rapporteurs de cette proposition de résolution.
De la même façon, nous saluons son adoption, à l’unanimité, par la commission des affaires européennes et la commission des affaires étrangères, et espérons qu’elle recevra le même accueil en séance publique.
Il en va de l’avenir de nos agriculteurs d’une part, mais aussi de notre souveraineté.
Je vous remercie.








