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Daniel Chasseing : Liberté de recourir à l'interruption volontaire de grossesse

28 février 2024

Projet de loi constitutionnelle relatif à la liberté de recourir à l'interruption volontaire de grossesse - Voir le dossier législatif



Madame la Présidente,

Monsieur le garde des Sceaux,

Monsieur le Président de la Commission des lois,

Madame le Rapporteur,

Mes chers Collègues,

 

Personne ne devrait plus remettre en cause la liberté des femmes à mettre volontairement fin à leur grossesse. Près d'un demi-siècle après sa reconnaissance, elle semble fermement ancrée dans notre droit, protégée et non menacée.

 

Si tel est bien le cas en France, cette liberté n'existe cependant pas dans bon nombre de pays. Nous observons, en outre, des reculs au sein des démocraties, y compris en Europe. La Cour suprême des États-Unis a elle-même rendu en 2022 un arrêt permettant aux États fédérés de revenir sur celle des femmes.

 

Nous ne pouvons que comprendre l'émotion suscitée par cette décision. La crainte de nos concitoyens, nos concitoyennes, pour l'avenir de l'IVG nous paraît donc compréhensible.

 

L'ensemble du Groupe Les Indépendants tient à réaffirmer ici leur entier soutien à la liberté d'avorter. Comme tous les parlementaires, nous avons à cœur de l'encadrer au mieux et de rendre son exercice accessible chaque fois que cela est nécessaire.

 

Le projet de loi que nous examinons est une des initiatives visant à inscrire l'IVG dans la Constitution pour lui donner une protection supérieure à celle conférée par la loi. Cependant, il nous faut préciser ici que cette initiative, comme vous l'avez dit Monsieur le Ministre, n'améliorera en rien l'exercice effectif de cette liberté.

 

Nous devons donc rester vigilants quant aux difficultés d'accès de nos concitoyennes à l'IVG, le cadre légal doit être la seule borne de cette liberté.

 

L'IVG figure actuellement dans la loi, mais sa protection est cependant supra légale. En effet, le Conseil constitutionnel a jugé que la liberté d'avorter est l'une des composantes de la liberté de l'individu. L'IVG bénéficie ainsi d'une reconnaissance de valeur constitutionnelle.

 

Une telle reconnaissance n'est toutefois pas gravée dans le marbre, dans la mesure où le Conseil constitutionnel pourrait modifier sa jurisprudence, tout comme la Cour suprême américaine a modifié la sienne.

 

Plusieurs textes ont proposé de constitutionnaliser l'IVG. Nous devons garder à l'esprit cependant que ce que fait une révision constitutionnelle, une autre peut le défaire, mais ce serait beaucoup plus difficile. Rappelons-nous l'importance du choix des mots en droit et singulièrement lorsqu'il s'agit de la Constitution.

 

L'IVG, comme toutes les libertés, ne saurait être une liberté absolue. Il est essentiel qu'elle continue à être encadrée par la loi, tant en ce qui concerne les praticiens habilités à le réaliser, que s'agissant des délais dans lesquels elle peut être pratiquée.

 

Nous voulons ici réaffirmer notre attachement à préserver la clause de conscience des médecins. Ceux qui ne souhaitent pas réaliser cet acte doivent rester libres de ne pas le faire. Cette clause et la liberté des femmes doivent pouvoir coexister.

 

Faut-il réinscrire dans la Constitution cette clause qui figure déjà dans la loi ? Il ne me semble pas. Il faut souligner que le fait d'avoir choisi la liberté plutôt que le droit est une formulation qui préserve au mieux les équilibres du régime actuel.

 

Nous sommes également attachés à la précision selon laquelle l'IVG est une liberté et non un droit opposable, nous considérons qu'il revient au législateur et non au juge d'en définir les contours.

 

Nous estimons à cet égard que le terme de liberté garantie est une formule superfétatoire. La garantie de cette liberté réside bien davantage dans l'inscription au sein de la Constitution que dans cet adjectif déclaratoire.

 

Ceci étant, en rappelant encore une fois leur soutien à la liberté d'avorter, les membres du Groupe Les Indépendants voteront selon leur conscience, pour très majoritairement, d'autres s'abstiendront.

 

Merci.

 

Interventions au Sénat

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