Laure Darcos : Réforme de l'audiovisuel public
- Les Indépendants
- 10 juil.
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10 juillet 2025
Deuxième lecture de la proposition de loi, rejetée par l'Assemblée nationale, relative à la réforme de l'audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle - Dossier législatif
Monsieur le Président,
Madame la Ministre,
Monsieur le Président de la Commission,
Monsieur le Rapporteur,
Mes chers Collègues,
Nous examinons aujourd'hui dans des conditions pour le moins rocambolesques, en deuxième lecture, la réforme de l'audiovisuel public.
Cela fait déjà plusieurs années que notre chambre s'est saisie de cette question. Je pense notamment au rapport des sénateurs Jean-Pierre Leleu et André Gattolin, paru en 2015 sous la houlette de la présidente de la commission de l'époque, notre collègue Catherine Morin-Desailly, ainsi qu'à celui de Roger Karoutchi et Jean-Raymond Hugonet, publié en 2022. Il y a eu bien sûr la tentative de réforme menée par le ministre Franck Riester qui fut interrompue par la crise sanitaire.
C'est dans ce contexte qu'a été déposée la présente proposition de loi dont je salue l'auteur, Laurent Laffont. Le Sénat l'a adoptée il y a déjà deux ans en première lecture, mais son examen à l'Assemblée nationale a tourné court. L'audiovisuel public est aujourd'hui régi par la loi Léotard qui date de 1986. Depuis l'adoption de cette loi, notre société et nos médias ont fait l'objet de transformations majeures, comme beaucoup d'entre vous l'ont dit avant moi.
Que ce soit l'émergence des réseaux sociaux, les smartphones, l'internet ou encore les tablettes, la situation a bien changé en l'espace de 40 ans. Il est donc essentiel de nous adapter. Nous le savons tous, le cœur de la réforme était la création d'une holding, France Média, qui regrouperait France Télévisions, Radio France, France Média Monde et l'INA.
Néanmoins, je pense sincèrement que l'ambition d'origine s'est muée en une future fusion qui ne dit pas son nom, et que sa raison d'être se borne à avoir un grand Manitou à la tête de cette nouvelle instance et des sociétés qui la composeront. Ce n'est plus du tout le texte de la première lecture que j'avais voté bien volontiers en 2023.
J'ai aujourd'hui une pensée pour leurs dirigeants, Sibyle Veil, Delphine Ernotte, Marie-Christine Saragosse et Laurent Vallée, qui ont fait l'objet d'attaques regrettables, alors qu'ils n'ont pas démérité dans leurs fonctions, loin s'en faut, et qu'ils seront sans doute tout bonnement remerciés si ce texte est adopté définitivement. Seule exception, France Média Monde, qui devait initialement intégrer la holding, pourrait y échapper si les nombreux amendements déposés en ce sens sont adoptés.
Nous pouvons nous en réjouir au regard des particularités de ces structures sur le plan international. Dès lors, au regard des évolutions contenues dans le texte, il nous appartiendra de veiller à ce que chacune des composantes de cette nouvelle holding conserve son âme et ses spécificités, en espérant que nous ne reviendrons pas à notre bonne vieille ORTF. À cet effet, nous devrons être vigilants sur les dispositions de cette PPL qui porte sur la direction de la holding et ses sociétés. Chacune d'elles doit pouvoir être dotée de responsables qui ne seront pas les simples délégués du PDG de France Média. Il en va de la richesse de cet audiovisuel public français.
Par ailleurs, je n'ai toujours pas compris comment, dans la foulée de la création de cette holding, la gouvernance de France Média pourrait procéder à des redécoupages en filiales inter-sociétés, avec les difficultés de fusionner les grilles salariales et les statuts des journalistes et fonctions supports, si différents d'une société à l'autre. Et tout cela, sans aucune étude d'impact, faut-il le rappeler ?
J'ajoute que la présente réforme intervient dans un contexte budgétaire particulier. La suppression de la contribution à l'audiovisuel public en 2022 partait d'un principe louable, bien que je m'y sois vivement opposée pendant la campagne présidentielle. Comme prévu, elle a eu des conséquences non négligeables.
La loi organique portant réforme du financement de l'audiovisuel public a permis d'apporter une première réponse, mais est-ce suffisant ? Trois ans après la suppression de la redevance télé, Bercy cherche encore à réaliser des économies. La création de la holding devrait permettre la mutualisation de fonctions support. Selon les estimations de l'Inspection générale des finances, cela pourrait générer 10 millions d'euros de gains par an. Nous le verrons bien.
Par ailleurs, je tiens à alerter sur la nécessité de retirer de ce texte les dispositions de l'audiovisuel privé qui doivent bénéficier d'une réforme distincte afin de mieux prendre en compte ces spécificités. Le privé et le public font face à des problématiques différentes. Chaque secteur mérite un texte qui y réponde avec efficacité de façon adaptée.
Comme vous pouvez le constater, mon avis et celui de mes collègues du Groupe Les Indépendants deviennent de plus en plus mitigés au fur et à mesure de l'avancement de ce texte qui accouche dans la douleur et nous attendons nos échanges lors de la discussion des amendements avec intérêt pour éclaircir certains points cruciaux.
Je vous remercie.








