27 juillet 2022
Question d'actualité au Gouvernement
Monsieur le Président,
Madame la Ministre,
En France, chaque village a son église, chaque église ses vitraux. Ces créations, qui datent souvent de plusieurs siècles, illuminent le patrimoine de tous nos territoires.
C’est particulièrement vrai dans l’Aube, où l’on compte la plus grande concentration nationale de vitraux, avec 9 000 m² de verrières réparties dans 200 édifices. On peut y admirer toute l’évolution de cet art, du 12e siècle à nos jours.
Les maîtres-verriers sont les dépositaires de ces savoir-faire pluriséculaires. Ils les font vivre par la restauration des vitraux, mais aussi par des créations nouvelles, qui excèdent largement le cadre religieux.
Or, pour continuer à faire vivre ces savoir-faire de restauration et de création, les vitraillistes recourent depuis toujours au plomb. Cette substance, dont la toxicité est avérée est intégrée à leurs pratiques. Ils s’en protègent via les EPI mais la médecine du travail doit assurer un meilleur suivi car malheureusement, ils ne disposent pas d’alternative à cette substance.
Aujourd’hui, ces savoir-faire, Madame la Ministre, sont menacés par la révision du règlement européen REACH, qui encadre l’utilisation des substances chimiques et prévoit tout simplement l’interdiction du plomb.
C’est bien simple, Mes chers Collègues, si le plomb est interdit, les vitraillistes ne pourront plus exercer leur activité. Pour prendre un exemple concret qui parle à chacun d’entre nous : sans plomb, impossible de restaurer à l’identique les vitraux de Notre-Dame de Paris.
J’ai déposé une proposition de résolution européenne pour défendre une exemption, de droit et sans frais, pour tous les vitraillistes. Le Sénat l’a adoptée. Je tiens à remercier les deux rapporteurs qui ont planché sur ce texte, mes collègues Catherine Morin-Desailly et Louis-Jean de Nicolaÿ. Ils ont montré que d’autres métiers d’art, tels les facteurs d’orgue, étaient menacés par cette interdiction.
Madame la Ministre, ma question est simple : défendrez-vous, au niveau européen, une exemption, à titre gracieux, pour ces métiers d’art ? La Chambre des territoires vous le demande. Il en va de la préservation et de la valorisation de notre patrimoine exceptionnel.
Je vous remercie.
Réponse de Madame Laurence BOONE, Secrétaire d’État chargée de l’Europe
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
et Madame la Sénatrice PAOLI-GAGIN,
D’abord votre question me donne l’occasion de vous remercier pour le travail réalisé depuis plusieurs semaines sur cet enjeu qui est important ; le travail que vous avez réalisé avec votre proposition de résolution européenne adoptée par la Commission des Affaires européennes du Sénat la semaine dernière et dont j’ai évidemment pris connaissance.
Vous l’avez dit, l’Aube et en particulier la ville de Troyes est le berceau de l’art du vitrail et je crois que tous ici, nous connaissons votre engagement sur ce sujet essentiel puisqu’il préoccupe nos entreprises du vitrail, des monuments historiques et de manière générale, c’est l’ensemble du tissu du patrimoine français.
Et donc, avec ma collègue Rima ABDUL-MALAK nous sommes particulièrement attentives aux consultations et discussions qui sont menées au niveau européen.
Rima ABDUL-MALAK, comme vous le savez, ne peut malheureusement pas être avec nous aujourd’hui puisqu’elle accompagne le Président dans son voyage au Bénin.
Une consultation publique a été ouverte, elle a duré du 2 Février au 2 Mai 2022 par l’Agence européenne des produits chimiques sur le projet de recommandation des substances prioritaires pour leur inclusion dans la liste des substances qui seront soumises à autorisation du Règlement Européen REACH. Je souligne que celui-ci ne prévoit pas l’interdiction, mais il propose de soumettre le plomb à autorisation et le résultat de la consultation n’est pas encore connu. Donc le comité des états membres qui s’appelle comité REACH devra se prononcer sur le tonnage, sur la dangerosité et le caractère dispersif et il examine évidemment l’impact sur l’industrie.
Vous nous l’avez demandé, le Gouvernement entend évidemment la voix du Sénat sur ce sujet et je peux vous assurer de notre pleine mobilisation auprès de la commission européenne pour garantir que toute évolution de la réglementation en la matière, permette de préserver l’ensemble du secteur du vitrail, des monuments historiques et du patrimoine culturel.
Merci Madame.