16 mars 2023
Proposition de loi relative aux outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités (voir le dossier législatif)
Texte inscrit à l'ordre du jour du Sénat par notre Groupe
Le 16 mars 2023, le Sénat a examiné en séance publique la proposition de loi relative aux outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités déposée par le Sénateur Dany Wattebled.
Les chiffres de l'accès aux soins dans notre pays sont alarmants : 87% du territoire national est considéré comme un désert médical, et six millions de Français n'ont pas de médecin traitant. Il nous faut agir au plus vite et efficacement face à cette situation.
Pour assurer l'égal accès aux soins dans les territoires, les collectivités territoriales sont déjà force de propositions, en étant par exemple à l'origine de 23% des centres de santé.
Le Sénateur Dany Wattebled proposait ainsi de rendre possible la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux auprès des cabinets médicaux et des centres de santé situés dans un désert médical comme une solution temporaire pour soutenir les médecins désirant s'installer dans ces territoires.
Le Sénateur Jean-Pierre Decool, orateur de notre Groupe, a rappelé que la proposition du Sénateur Dany Wattebled permettait ainsi pour les collectivités d'avoir un nouveau levier pour travailler au maillage territorial de santé, nécessaire à l'attractivité des territoires.
Face à l'impérieuse nécessité de répondre aux difficiles accès aux soins en France, notre Groupe regrette le rejet de la proposition de loi du Sénateur Dany Wattebled. Nous regrettons particulièrement que plusieurs Sénateurs n’aient pas soutenu en séance, un texte qu’ils avaient voté en Commission des Affaires sociales. La proposition de loi avait été adoptée le mercredi 9 mars par la Commission sur proposition du Rapporteur, le Sénateur Daniel Chasseing.
📌 Dans la presse :
"Des Sénateurs proposaient que des fonctionnaires territoriaux soient mis à disposition des médecins libéraux". Voir l'article de Egora en cliquant ici
"Le Sénat dit non à la mise à disposition de fonctionnaires auprès de médecins libéraux". Voir l'article de Acteurs publics en cliquant ici
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Dany WATTEBLED, auteur de la proposition de loi
Monsieur le Président,
Madame la Ministre,
Monsieur le Président de la Commission,
Monsieur le Rapporteur,
Mes Chers Collègues,
La désertification médicale ne cesse de progresser en France. Derrière cette expression, entrée dans le langage courant, il y a une réalité pour 49 millions de Français et de Françaises.
Nous avons tous entendu les mêmes récits et les mêmes questions :
Comment faire renouveler son ordonnance quand il n’y a plus de généraliste ?
Comment accéder à un spécialiste quand ce dernier n’a pas de remplaçant ?
Comment se faire soigner s’il n’y a pas de médecin près de chez nous ?
Lutter contre la désertification médicale est un enjeu de santé publique pour une population qui augmente, qui vieillit et souffre de plus en plus souvent de maladies chroniques.
Dans certains territoires, il faut parfois attendre 20 jours pour obtenir un rendez-vous chez un généraliste. Pour les consultations chez un spécialiste, les délais augmentent : ne serait-ce qu’attendre 5 mois pour obtenir un rendez-vous chez un ORL. C’est un vrai problème en termes de soins, de dépistage, au risque d’aggravation de l’état de santé des patients.
C’est aussi un problème pour tous les professionnels de santé confrontés à une charge de travail très importante, et pas forcément entièrement consacrée à la médecine.
Et cela explique également le désintérêt des étudiants et des étudiantes pour l’exercice de la médecine générale en libéral.
Pendant 50 ans, le numerus clausus a contribué à tarir l’offre de soins : sa réforme en 2019 est une bonne nouvelle. Mais, nous le savons tous, il va falloir attendre quelques années avant de voir ses premiers effets.
D’autres réponses ont été apportées. Toutefois, la politique menée associe insuffisamment les collectivités.
Les élus locaux se retrouvent démunis face à des départs de médecins. Et ils n’ont pas suffisamment de moyens pour rendre leurs territoires attractifs afin d’en faire venir de nouveaux. Pourtant, les maires font preuve d’initiatives et proposent des réponses innovantes.
Nous devons leur faire confiance !
J’en veux pour preuve que les collectivités se sont systématiquement et pleinement saisies de chacun des outils en matière de santé mis à leur disposition.
Par exemple, les collectivités ont été innovantes en étant à l’origine de 23 % des centres de santé.
Elles ont également été pragmatiques et volontaristes, en proposant des mises à disposition de locaux ou des aides financières aux médecins qui s’y installeraient.
Face au désarroi de nombreux maires, il m’est apparu utile de leur donner de nouveaux moyens pour agir en matière de santé. Nous savons tous que les médecins croulent sous les tâches administratives.
Nous pouvons comprendre leurs inquiétudes d’arriver sur un nouveau territoire avec une nouvelle patientèle sans personnel administratif.
C’est pourquoi, j’ai proposé de rendre possible la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux auprès de cabinets médicaux et de maisons de santé dans un désert médical.
Pourquoi des fonctionnaires territoriaux me direz-vous ?
En réalité, c’est une évidence. Imaginons une commune mettant à disposition un personnel de mairie afin d’officier temporairement en tant que secrétaire d’un cabinet médical.
Cet agent est en parfaite mesure d’accueillir les patients et d’apporter un appui administratif au médecin. Il connaît les professionnels de santé locaux ainsi que les habitants et peut assurer une bonne coordination entre eux et le médecin nouvellement arrivé.
C’est simple, pragmatique et efficace.
Avant de continuer, je voudrais remercier chaleureusement l’ensemble de la commission et le rapporteur Daniel Chasseing pour leur excellent travail.
Fort de son expérience en tant que médecin généraliste en milieu rural, le Docteur Chasseing a parfaitement compris l’esprit que j’ai voulu donner à cette proposition de loi, et, l’intérêt pour certaines communes de recourir à ce dispositif.
Ainsi a-t-il proposé une nouvelle rédaction particulièrement claire afin de délimiter le dispositif avec précision.
Le texte de la commission, aujourd’hui soumis aux voix de notre Haute Assemblée, ouvre la possibilité pour les collectivités territoriales situées dans les déserts médicaux, de mettre un agent à disposition d’un médecin, uniquement s’il exerce la mission de service public de permanence de soins, pour une durée de 3 mois renouvelable 2 fois et seulement à son arrivée sur le territoire.
Le droit commun prévoit, sauf dérogation, que le salaire de l’agent doit être remboursé par la structure d’accueil. Aussi ce dispositif peut-il se concevoir comme une avance de trésorerie par les médecins nouvellement arrivés.
Il s’agit de donner aux élus locaux la possibilité d’accueillir dans les meilleures conditions un médecin, alors qu’il n’y en a plus.
Une fois lancé, le médecin recrutera son équipe ou bénéficiera des différentes aides proposées par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie ou les Agences Régionales de Santé et l’agent recouvrera ses fonctions initiales. Les cabinets libéraux doivent bien entendu rester libéraux !
Mes Chers Collègues, l’urgence de la situation nous oblige à faire feu de tout bois dans la lutte contre la désertification médicale.
Je vous sais tous concernés et je compte sur vous.
Je vous remercie.
Jean-Pierre DECOOL, orateur de notre Groupe
Madame la Présidente,
Monsieur le Président de Commission,
Madame la Ministre,
Monsieur le Rapporteur,
Mes chers Collègues,
49 millions d’habitants vivent dans un désert médical, soit 72 % de la population française. Certes, notre population est vieillissante, mais nous avons formé moins de soignants. Des « experts » ont pensé faire des économies sur le système de santé tout en gagnant en innovation et en efficacité ! Au contraire, la gouvernance s'est alourdie et a rigidifié beaucoup de procédures. Un cloisonnement ville-hôpital s'est installé…
Les conséquences, aussi, sont bien connues : allongement des délais pour obtenir un rendez-vous, au risque d’une dégradation de l’état de santé du patient ;
déport de consultations vers les urgences médicales ;
difficultés, pour le moins, de trouver un médecin traitant, et donc rupture du parcours et de la permanence de soins, pourtant garantis par la loi !
Si nous partageons ce constat, nous partageons également la responsabilité de pallier ce problème.
Certaines réponses ont été apportées. Je pense notamment à la création d'une 4ème année d'internat de médecine générale, consacrée à des stages en cabinet médical, en priorité dans les zones médicalement tendues. Cette proposition initialement faite par le Président Retailleau est de bon aloi et attendue. Toutefois, il nous faut encore attendre les premiers effets.
Mes chers collègues, cette situation nous oblige à accueillir toute initiative avec responsabilité. Il n’est pas question de se priver d’outils avérés utiles.
La proposition de loi examinée aujourd’hui est un de ces outils. Ce texte proposé par notre collègue Dany Wattebled comporte un article unique permettant la mise à disposition d’agents auprès de cabinets communaux et de maisons de santé par les collectivités territoriales.
En début d’année, lors de ses vœux aux acteurs de santé, le Président de la République a précisé, je cite : « Les médecins généralistes doivent pouvoir se concentrer sur la santé et rien que sur la santé. »
Cette proposition de loi pourrait permettre d’aller vers cette ambition !
Toutefois, il n’est pas question de déléguer la gestion administrative des cabinets médicaux aux collectivités territoriales. À cet égard, je tiens à saluer le travail du rapporteur. Le Docteur Daniel Chasseing, fort de sa connaissance du monde médical en milieu rural, a su donner à cette proposition de loi une orientation précise.
Il faut entendre ce texte comme l’ouverture d’une possibilité pour les collectivités territoriales volontaristes.
Il s’agit de leur donner la faculté de mettre, pendant une courte période, soit trois mois, renouvelable deux fois, un agent à disposition d’un cabinet médical ou d’une maison de santé. Le traitement de l’agent sera naturellement remboursé ultérieurement par la structure d’accueil.
Ce dispositif pourrait être utilisé exclusivement lorsqu’un nouveau médecin arrive, et s’il exerce la mission de service public de permanence de soins.
Ce dernier point est tout à fait important. La permanence de soins est au fondement de notre réflexion dans la lutte contre la désertification médicale. Elle doit être l'affaire de toutes et de tous !
Les élus locaux souhaitent légitimement pouvoir assurer cette mission de service public sur leurs territoires. Nous devons les accompagner dans cette direction.
Vous le savez, je suis un ardent défenseur de l’initiative parlementaire. Les expériences sur le terrain, en contact direct avec les élus locaux et nos concitoyens nous guident dans la rédaction et la proposition d’évolutions législatives ayant pour objectif de répondre à des difficultés concrètes.
Le texte proposé par notre collègue Dany Wattebled s’inscrit dans cet esprit.
Mes chers Collègues, avant de conclure, je voudrais relever les propos de certains orateurs qui m’ont précédé à cette tribune, lorsqu’il s’agissait d’évoquer les personnels des collectivités territoriales, quant à leurs compétences et le respect de la confidentialité. Nous leur avons fait confiance, quand il s’est agi de mettre en place les agences postales, dans une situation similaire. Nous leur avons fait confiance pour soutenir les actions lorsqu’il s’est agi de lutter contre le Covid.
Mes chers Collègues, ne manquons pas l’occasion de créer un nouveau levier pour lutter contre la désertification médicale. Le Groupe Les Indépendants votera naturellement pour cette proposition de loi.
Je vous remercie.
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