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Jean-Pierre DECOOL : Conclusions CMP PJL Evolution du logement, de l'aménagement et du numérique

16 octobre 2018


Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique

Messieurs les ministres,

Chers collègues,

Nous franchissons la dernière étape de l’examen de ce mastodonte législatif. Le texte initial prévoyait 65 articles. Il en contient désormais 234. Ces chiffres mettent en lumière l’importance du travail législatif du Parlement. Nous avons contribué durant de longues heures de débats, à nourrir ce texte qui présage d’une réforme complète de la politique du logement en France. C’était un travail d’orfèvre tant les attentes de la société pour remédier à la crise du logement étaient considérables !

Nous avons tenu notre rôle de représentant des collectivités territoriales. Nous avons veillé, au Sénat, au renforcement du pouvoir des élus locaux en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire. Je salue particulièrement la persévérance des rapporteurs, Dominique Estrosi-Sassone, Marc-Philippe Daubresse, Jean-Pierre Leleux et Patrick Chaize, ainsi que le travail de conciliation mené par la présidente de commission, Sophie Primas.

La commission mixte paritaire est parvenue à un accord le 19 septembre dernier. Un certain nombre des dispositions adoptées au Sénat ont été conservées, préservant l’autorité et les prérogatives des élus locaux en matière de logement. L’avis conforme des maires pour la création des grandes opérations d’urbanismes, dispositif phare de ce projet de loi, est maintenu. Une expérimentation permettra aux communes ayant atteint 20% de logements sociaux de mutualiser la construction de nouveaux logements à l’échelle de l’intercommunalité. Au sein des commissions d’attribution de logements sociaux, les maires disposeront d’une voix prépondérante en cas d’égalité. Les obligations de créations d’aires de stationnements seront supprimées dans les zones tendues. Pourquoi imposer des parkings lorsque l’on arrive à peine à se loger dans certains centres-villes ? De nouvelles voies de dialogue entre maire et architecte des bâtiments de France seront ouvertes et l’accès au juge pour contester les décisions de ces derniers sera amélioré.

L’intégration au projet de loi de la proposition de loi sur la revitalisation des centres villes de notre collègue Rémy Pointereau est un gage supplémentaire de remise en mouvement des cœurs de villes en déshérence.

Par ailleurs, le texte regroupe un ensemble de dispositions visant à lutter contre le mal logement et à limiter la criminalité, telles que le durcissement des peines pour les marchands de sommeil, la lutte contre l’occupation illégale, et donc incontrôlée, la résiliation de bail en cas de trafic de stupéfiants…

Pour autant, tout n’est pas noir ou blanc. Le projet de loi n’est pas parfait.

Le Sénat avait proposé d’abaisser le seuil de regroupement des bailleurs sociaux de 15 000 à 10 000 logements afin de préserver l’autonomie des plus petits opérateurs, notamment les organismes publics. La Commission mixte paritaire est parvenue à un accord, portant ce seuil à 12 000 logements, ce qui reste élevé et inquiète une partie des élus locaux notamment dans les territoires à faible densité de population et les zones montagneuses. Les économies d’échelles réalisées par ces regroupements justifient-elles la distension du lien local de la politique sociale du logement ?

Il nous semble regrettable que l’avis des maires pour la vente de logements sociaux ne soit obligatoire que pour les communes déficitaires. De la même façon, le fléchage d’au moins 50% du produit des ventes vers la construction de nouveaux logements sociaux a été circonscrit à ces mêmes communes. S’il nous apparait essentiel de dynamiser les parcours résidentiels dans ce secteur, ces mesures représentent une atteinte au pouvoir des élus en matière de politique sociale. Nous nous devons de dénoncer ces dispositions palliatives et court-termistes.

Un compromis a été trouvé en matière d’accessibilité des logements neufs pour les personnes porteuses d’un handicap. Le texte prévoyait un taux, peu ambitieux, de 10%. Notre groupe avait proposé d’élever ce taux à 20% en commission des affaires économiques, nous sommes donc satisfaits du taux issu de la commission mixte paritaire, d’autant que les logements restants seront adaptables, c’est-à-dire visitables par des personnes à mobilité réduite et aisément transformables en logements accessibles.

Si le projet de loi va dans le bon sens, un certain nombre de mesures représente une menace pour le pouvoir des maires dont nous sommes, au Sénat, les portes paroles. Une réforme, pour être efficace, applicable et appliquée, ne peut faire l’économie des autorités décentralisées de la République.

Messieurs les ministres, chers rapporteurs, nous ne nous opposerons pas à ce texte. Malgré nos désaccords, nous saluons le succès de la commission mixte paritaire. Dans l’ensemble, l’empreinte du Sénat est préservée, tout comme l’esprit initial du texte du Gouvernement qui était de simplifier et libéraliser le secteur de la construction pour favoriser son adaptation aux grandes évolutions de notre société.


Interventions au Sénat

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