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Claude MALHURET : PJL relatif à la modernisation de la distribution de la presse

22 mai 2019


Projet de loi relatif à la modernisation de la distribution de la presse

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre,

Monsieur le Rapporteur,

Madame la Présidente de la Commission de la Culture,

Mes chers collègues,

La distribution de la presse est depuis trop longtemps au bord du gouffre. Presstalis, principal acteur du secteur qui distribue l’intégralité des quotidiens, présente à ce jour 400 millions d’euros de fonds négatifs. Avec une distribution de la presse en grande difficulté, c’est le pluralisme des opinions qui risque de chanceler.

Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, qui doit beaucoup au totalitarisme et au populisme, la loi Bichet rappelait le principe essentiel de la libre distribution de la presse.

Principe confirmé par le conseil constitutionnel qui souligne que la libre communication des pensées et des opinions, nécessite que le public dispose d'un nombre suffisant de publications de tendances et de caractères différents.

La distribution de la presse au numéro doit ainsi concourir à atteindre l’objectif à valeur constitutionnel du pluralisme. La loi Bichet a participé à la réalisation de cet objectif. Le Conseil d’Etat indique que 4 400 titres sont aujourd’hui distribués en France ; contre 2 500 au Royaume-Uni et 1 600 en Allemagne.

Cette réussite a néanmoins un coût, puisque notre système prévoit une large couverture du territoire et un nombre important de publications.

Ce coût s’est trouvé aggravé par la réduction structurelle de la vente de papier au numéro. En dix ans, cette vente a fondu de moitié. Un tiers des points de vente ont disparu. Chaque année, ce sont 1 000 points de vente qui ferment.

Aussi, il est nécessaire de réformer le cadre de la distribution de la presse au numéro en France, afin de l’adapter au changement de la société et afin de renforcer l’efficacité économique du secteur.

Le rapport de Marc Schwartz avait permis de mettre en lumière les difficultés du système actuel : la gouvernance doit évoluer et l’efficacité économique revenir au centre de l’activité.

L’objet du projet de loi que nous examinons est de réformer le secteur en douceur, si je peux dire. Il est ainsi proposé d’ouvrir la distribution de la presse au numéro à la concurrence, de manière progressive et encadrée.

Le groupe Les Indépendants est convaincu qu’une concurrence loyale favorisera utilement les gains d’efficacité économique et participera à l’assainissement du secteur. La mise en concurrence est selon nous nécessaire et utile mais cette concurrence doit être encadrée.

Un tel encadrement est nécessaire pour qu’elle soit loyale ; mais aussi afin de s’assurer de la préservation du pluralisme des opinions, si essentiel à la vie démocratique.

Le projet de loi prévoit de passer de deux régulateurs à un seul. Cette unification nous semble être une mesure de bon sens. Néanmoins, la régulation par l’ARCEP a soulevé certaines critiques. Cette autorité saura-t-elle aller au-delà d’une régulation purement économique ? L’avenir nous le dira, il appartiendra à l’ARCEP de faire ses preuves.

Quoiqu’il en soit, nous nous félicitons que notre Commission ait veillé, en augmentant les compétences de l’ARCEP, à rendre leur exercice plus transparent et en évoquant le travail de la Commission, je voudrais féliciter notre rapporteur Michel Laugier pour la qualité du travail effectué et le professionnalisme dont il a fait preuve, tout au cours de cet examen.

Afin de redynamiser le secteur, le projet de loi apporte davantage de souplesse aux quelque 24 000 acteurs qui sont en première ligne de la vente de presse au numéro : les diffuseurs de presse.

Nous sommes convaincus que les points de vente sont les mieux à même de connaître les attentes des clients. Ils doivent être en mesure de mettre en avant les titres qui y correspondent. Cette liberté ne saurait toutefois s’exercer au détriment du pluralisme de la presse d’information politique et générale.

Enfin, nous félicitons que le projet de loi se propose de commencer à dompter le far ouest que constitue l’information sur Internet, comme beaucoup d’autres choses sur internet.

Nous avons commencé à agir, avec la création du droit voisin de la presse, afin que les acteurs du numérique cessent d’exploiter les contenus des agences de presse et des éditeurs de presse, sans autorisation, ni rémunération.

Mais, outre le sujet de la rémunération, il faut prendre en considération le fait que les plateformes d’agrégation de contenus orientent sensiblement l’opinion publique, en sélectionnant les articles qu’elles présentent aux usagers.

Les habitudes de consommation de nos concitoyens évoluent de plus en plus vers le numérique au détriment de l’écrit. Il est par conséquent primordial que les usagers de la presse numérique puissent savoir sur quels mécanismes repose la présentation de l’information qui leur est faite.

Nous sommes favorables à la réglementation instituée par le texte, qui astreint les opérateurs numériques à respecter le pluralisme et les soumet à des obligations explicites de transparence.

Nous serons contraints d’ailleurs, d’intervenir plusieurs fois sur ces sujets, au gré des évolutions technologiques. A chacune de nos interventions, il nous faudra renforcer la transparence et à défaut la défendre, le pluralisme et la démocratie.

Je constate enfin avec regret mais sans surprise, que la CGT a décidé d’empêcher la parution des quotidiens le jour même où le Sénat examine la loi portant réforme de la vente en kiosque et destinée à la sauver. Y a-t-il une chose plus absurde que de continuer à dire à tous ceux qui continuent à lire le journal papier : « pour le défendre, nous vidons les kiosques aujourd’hui et nous vous forçons à vous rabattre sur la version web de votre quotidien.

Le Groupe les Indépendants lui, soutient ce projet de loi, convaincu que le texte est parvenu à de justes équilibres. Nous espérons que la distribution de la presse y puisera un nouveau souffle.

Je vous remercie.


Interventions au Sénat

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