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Dany WATTEBLED : Accueil des gens du voyage et lutte contre les installations illicites

31 octobre 2017


Proposition de loi relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites


Madame la présidente,

Madame la ministre,

Madame la rapporteur,

Mes chers collègues,


De nombreux maires subissent chaque année des occupations illicites de terrains par des gens du voyage et, faute de disposer des moyens de lutter efficacement contre ces pratiques, ils ne peuvent que constater l’impunité dont bénéficient leurs auteurs.

L’exaspération des élus locaux se fait entendre de plus en plus, leur sentiment d’abandon et de solitude aussi… Ils sont totalement désemparés lorsqu’ils voient que les lois de la République ne sont pas respectées.

Une telle situation est inacceptable ! Qui peut la nier aujourd’hui ? Quel sénateur, quelle que soit la famille politique à laquelle il appartient, peut affirmer qu’il n’a jamais été alerté par des élus de son département sur les désordres qu’engendrent les occupations illicites, sur les intimidations à l’égard des représentants de l’ordre public et de la population, sur les destructions, les dégradations ou les détériorations de biens publics ou privés ?


Mes chers collègues, si nous voulons pacifier les relations entre les Français sédentaires et les gens du voyage, il faut donc donner plus de droits aux communes et plus de moyens juridiques à leurs élus afin d’équilibrer les droits et devoirs des gens du voyage, d’une part, et ceux des communes, d’autre part.


En application des dispositions de la loi dite « Besson 2 » du 5 juillet 2000, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale ont dû engager de lourds investissements afin d’accueillir les gens du voyage. Ainsi, toutes les communes de plus de 5 000 habitants ont été placées dans l’obligation de mettre en place une aire permanente d’accueil. En outre, en application des prescriptions du schéma départemental, elles ont pu se voir imposer la mise en place d’une aire de grand passage.

Pour information, en 2018, la métropole européenne de Lille, dont je suis élu, a pour objectif de créer 310 places d’aire permanente d’accueil et 200 places d’aire de grand passage, ce qui représente une dépense de plus de 4 millions d’euros en investissement et de 3 millions d’euros en fonctionnement, pour une recette globale de 1 million d’euros. Quand on sait que ces dépenses d’investissement accroissent les besoins de financement des collectivités, on peut s’interroger sur leur réalisation si l’article 10 du projet de loi de programmation des finances publiques est voté et appliqué dans sa rédaction actuelle, sachant que les collectivités territoriales respectent déjà des règles financières strictes en matière d’équilibre budgétaire. Mais nous aurons l’occasion d’en parler lors d’un prochain débat, mes chers collègues.

Les deux propositions de loi réunies en une seule par la commission des lois qui nous occupent tendent à permettre un meilleur équilibre, en matière de droits et de devoirs, entre les gens du voyage et ceux qui les accueillent.


Leurs dispositions prévoient tout d’abord de clarifier le rôle de l’État, des collectivités territoriales et de leurs groupements dans leur mission d’accueil des gens du voyage ; ensuite de moderniser les procédures d’évacuation des stationnements illicites ; enfin de renforcer et de rendre plus effectives les sanctions en cas d’installation illégale en réunion sur un terrain public ou privé.

Dans le texte issu des travaux de la commission, l’article 7, s’inspirant de l’article 3 de la proposition de loi de notre collègue Loïc Hervé, vise à créer, à l’article 322-3 du code pénal, une circonstance aggravante applicable au délit de destruction, de dégradation ou de détérioration d’un bien appartenant à autrui prévu à l’article 322-1 du code pénal.

Ainsi, les peines encourues seraient de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende en cas de destruction, de dégradation ou de détérioration d’un bien appartenant à autrui à l’occasion d’une installation illicite. Ces peines pourraient être portées à sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende lorsque le bien détruit, dégradé ou détérioré est destiné à l’utilité ou à la décoration publique et appartient à une personne publique ou chargée d’une mission de service public. Enfin, en cas de récidive, ces peines pourraient être doublées.

Même si la question de l’imputabilité de ces infractions demeure, je suis favorable à ces dispositions. Renforcer les sanctions pénales, c’est envoyer un signal fort aux magistrats, pour leur dire que les infractions commises par les gens du voyage doivent être sanctionnées. Sans sanction, il n’y a pas de dissuasion, et l’on consacre alors une impunité réservée à certains citoyens !

Je voudrais également dire un mot sur le schéma d’accueil des gens du voyage.

Actuellement, le dispositif d’accueil est défini à l’échelle départementale. Ce schéma est élaboré conjointement par le préfet et le président du conseil départemental. On peut regretter l’absence de concertation ou de discussion globale entre départements limitrophes sur ce sujet. Je pense que la mise en place d’un schéma interdépartemental d’accueil des gens du voyage constituerait une solution pertinente.

Enfin, je souhaite attirer votre attention sur les délais de procédure en matière d’évacuation en cas d’occupation illicite. Je regrette que les délais de la procédure administrative soient plus longs qu’en matière civile, tout comme je regrette que le parquet renonce trop souvent à poursuivre en cas de destruction, détérioration ou dégradation de biens…

Pour conclure, je dirai que ce texte répond aux attentes des élus locaux, qui sont confrontés tous les ans au déséquilibre entre les droits et les devoirs des gens du voyage et ceux des collectivités. Il constitue un cadre en vue de parvenir à restaurer cet équilibre, condition nécessaire pour assurer une cohabitation apaisée entre sédentaires et gens du voyage. Aussi le groupe Les Indépendants le votera-t-il.

Interventions au Sénat

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